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Je compris soudain pourquoi Marin m’avait téléphoné, ou plus exactement avait essayé de reprendre contact avec moi, après de longs mois de silence. Sa voix était méconnaissable. Tellement méconnaissable, que ce n’est qu’après notre trop brève conversation, brusquement interrompue, que je réussis à l’identifier.

Ignorant son état de santé, je ne compris pas que Marin appelait d’un hôpital. Croyant qu’il m’appelait d’un coin perdu, au cours d’un des rituels voyages qu’il effectuait en France, j’attendis lâchement qu’il me rappelle.

Ma désinvolture est coupable. Les paroles que je n’aurais pas manqué de prononcer, si j’avais pris conscience de la situation, je ne veux et ne peux les garder pour moi.

Je dédie cet article à la mémoire de Marin. J’adresse à ses filles Marica et Ecaterina, à leurs maris Roger et Cristian, et à la compagne de Marin, Iliana, mes plus sincères condoléances personnelles, et les condoléances de tous les membres et de tous les amis d’ICEO qui ont eut l’honneur et le bonheur de connaître Marin NISIPEANU.

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Nous espérons que cet article chronologique, qui rappelle la longue histoire d’amitié entre ICEO et Marin NISIPEANU, permettra aux lecteurs, qui ne l’ont pas ou peu connu, de comprendre pourquoi les responsables d’ICEO se doivent d’honorer sa mémoire, et assurer tous ses proches de la profonde reconnaissance qu’ils garderont pour lui.

Pour comprendre comment tout cela fut, mieux vaut quelques photos commentées, que de longs discours. Le choix parmi près d’une trentaine d’années de photos est très difficile. Cette sélection est forcément imparfaite. Cet article est certainement perfectible. Nous avons délibérément opté pour l’imperfection aujourd’hui, plutôt que pour la perfection demain.

Pour être tout à fait honnêtes, Marin et ICEO doivent reconnaître que, sans Nicolae CEAUCESCU, ils ne se seraient jamais connus.

Le 24 novembre 1989, lorsque cette photo fut prise, personne n’imaginait que les jours de Nicolae CEAUȘESCU, président de la République socialiste de Roumanie, étaient comptés. Malgré la chute du Mur de Berlin, le 9 novembre, aucun commentateur ayant été en Roumanie ne pouvait supposer que le dictateur roumain n’avait plus qu’un mois à vivre. Le régime mis en place semblait pouvoir durer encore longtemps. Le couple CEAUȘESCU semblait indéboulonnable, bien protégé par la célèbre Securitate. La folie destructrice du président roumain semblait pouvoir se poursuivre sans entrave.

Au printemps 1989, un reportage sur la destruction en cours du patrimoine architectural de la Roumanie, permit au futur Secrétaire général d’ICEO, Pierre, de convaincre sa famille d’aller admirer au plus vite les monastères roumains encore épargnés.

Début août 1989, découverte du magnifique Monastère de Sucevița.

Début août 1989, rencontre de Gheorghe, Niki et Ionut GEORGEANU.

La libre et longue discussion que les quatre Français ont eue avec cette famille parfaitement francophone durant la nuit les a fort instruits. Entre les Roumains, habitant à Pitesti et les Français de Montpellier, des liens d’amitiés se sont noués en quelques heures dans une des chambres du seul hôtel du lieu.

22 décembre 1989, Vlad, Andreï et Marin en train de faire l’Histoire.

Marin est élu le soir même président du Comité du Front de Salut National (CFSN) pour le judet (département) de Craiova (Dolj).

31 décembre 1989, Marin devant l’hôtel Jiul, première rencontre.

31 décembre 1989, accueil de la délégation française.

1er janvier 1990, Marin remercie les Français, qui promettent de revenir à Craiova le plus vite possible, pour mettre en œuvre des programmes d’assistance.

26 janvier 1990, retour en Roumanie du Secrétaire général d’ICEO. Marin est venu l’accueillir à l’aéroport Otopeni de Bucarest.

26 janvier 1990, pour les militaires, le président du CFSN de Craiova est une personnalité. Les amis de Marin sont les bienvenus.

26 janvier 1990, Marin a rendez-vous avec le Président ILLIESCU.

26 janvier 1990, le Président du FSN est bien gardé

26 janvier 1990, Marin, accompagné de son chauffeur, patiente.

26 janvier 1990, Pierre reste sous surveillance.

26 janvier 1990, après l’entretien avec le président, Marin et Pierre partent pour Craiova.

Après une brève halte à Pitesti, où Marin fait connaissance de la famille GEORGEANU, Marin et Pierre arrivent à Craiova, où les filles de Marin les attendent.

28 janvier 1990, rencontre avec les familles FLORESCU et TICA.

29 janvier 1990, le jour du retour en France, manifestations à Bucarest.

29 janvier 1990, Pierre devant le palais qui abrite la direction du FSN.

Mars 1990, séance de l’assemblée constituante de la future République.

Mars 1990, grâce à Marin, Pierre peut assister à cette séance de l’assemblée constituante en tant qu’observateur.

Mars 1990, Marin converse avec tous les membres de l’assemblée.

Mars 1990, Marin présente le Secrétaire général d’ICEO au Président ILLIESCU, venu assister aux travaux de l’assemblée constituante.

Les relations entre les deux hommes se sont détériorées depuis que Marin a été débarqué de la direction du CFSN de Craiova, suite à une manœuvre dirigée de Bucarest.

Le 21 Juillet 1990, mariage à Craiova de la fille ainée de Marin, Marica.

Marin a invité pour l’évènement, le Secrétaire général d’ICEO, un membre fondateur d’ICEO, Stephane, une toute nouvelle adhérente, Annie, et la fille du responsable de la commission agricole d’ICEO, Maylis, venue en avion, tandis que Pierre, Annie et Stéphane sont venus en voiture.

Le 23 Juillet 1990, début d’une grande aventure.

Les trois invités Français venus en voiture, ont fait la connaissance à l’occasion du mariage des amis bulgares de Marin. Les Bulgares leur ont très aimablement proposé de rentrer en France en passant par Sofia. Les Français ont alors proposé à Marin de les accompagner en Bulgarie, et pourquoi pas, de venir avec eux jusqu’en France. Obtenir un visa pour la France et l’Italie en 48 heures était chose impossible.

23 juillet-26 août 1990, Marin fera donc l’aller-retour sans visa.

Ressortissant roumain, Marin pouvait voyager sans visa, en Bulgarie et en Yougoslavie. Durant cette période de forte affluence touristique, franchir les frontières entre Yougoslavie et Italie, et plus encore, entre Italie et France était chose assez simple. En 1990, les Européens étaient encore plein de compassion pour les Roumains, à peine libérés d’une des pires dictatures communistes. Le pari semblait donc osé, mais pas trop risqué.

26 juillet 1990, Marin peut souhaiter la sainte Anne à Montpellier

21 Août 1990 Marin peut assister à la grande parade du festival interceltique de Lorient, l’un des plus importants festivals de France.

22 Août 1990, en route pour le Finistère Sud, arrêt à Guidel.

23 Août 1990, Passage au port du Guilvinec, langoustines et Kouing-amman, avant une escapade sur l’île de Sein.

24 Août 1990, Retour de Marin en Roumanie en repassant par Sofia. Vassil, Gueneta et Varban sont toujours aussi accueillants.

Depuis sa création, en moins de deux ans et demi, l’Institut de Coopération avec l’Europe Orientale a organisé plus de trente actions de coopération, d’étude et d’assistance. La Roumanie a été le partenaire le plus impliqué. En raison de la guerre dans l’ex-Yougoslavie, les missions sont devenues plus délicates. Pour aller en Roumanie et en Bulgarie, la frontière entre la Serbie et la Croatie devait être absolument contournée par la Hongrie.

25 Avril 1992, Vers Craiova en passant par Sofia. Sortie de route en Hongrie. Angel et Michel sourient à la vie. Serge est muet et invisible.

Pas question d’arrêter la mission pour un "petit" problème mécanique. La Maif , société d’assurance des enseignants, a fourni, dans sa grande mansuétude, une voiture de remplacement. Merci la Maif !

26 Avril 1992, Arrivée à Craiova, Serge, un verre de vin blanc à la main a retrouvé le sourire. Marin et Cati servent de guides et d’interprètes.

27 Avril 1990, visite d’un élevage de porc dans une des dernières fermes d’État. Dans quelques semaines la privatisation de l’agriculture roumaine sera l’occasion du "grand désossage".

28 Avril 1992, visite de l’ancienne cave royale de Segarcea. Une fois privatisée, cette cave a fait appel à des œnologues de Montpellier. Signalons que les deux dernières œnologues sont membres d’ICEO.

29 Avril 1992, en Roumanie, les experts d’ICEO ont beaucoup travaillé, beaucoup étudié, beaucoup appris, et beaucoup dégusté.

Juillet 1993, retrouvaille de la famille GEORGEANU à Pitesti.

Juillet 1993, merci à Niki et Gheorghe pour la fidélité de leur amitié.

27 septembre 1993, Mariage d’Ecaterina et Cristian à Craiova.

27 septembre 1993, Marin et sa mère.

Marin et sa femme, décédée avant 1990, étaient professeurs de Mathématiques à l’Université de Craiova. Leurs filles ont ainsi reçu au berceau un bagage mathématique hors du commun. ICEO n’eut donc aucun mal à soutenir leurs demandes pour venir faire des études de troisième cycle en France.

Deux jours après le mariage de sa sœur, Marica s’envolait pour Montpellier, où elle allait passer le DEA de Mathématiques, avant de passer une thèse à Limoges. Le 18 octobre, Marica pouvait être présente lorsque son compatriote de Craiova, Vlad, recevait les honneurs de la Faculté de Médecine de Montpellier.

18 octobre 1993, une page de fierté pour ICEO et une page de gloire pour Vlad, premier des étudiants de Craiova diplômés et distingués.

Arrivé en mars 1990 à la maternité de Montpellier, Vlad, diplômé de médecine à Craiova, a pu intégrer en cours d’année le cursus de formation français des obstétriciens-gynécologues. Remarqué pour son excellence, Vlad a reçu le titre honorifique d’assistant de la Faculté de Médecine de Montpellier, avant de retourner en Roumanie exercer son art. Depuis 1993, Vlad est devenu une sommité reconnue dans tous les Balkans.

De 1993 à 2007, les nombreux travaux et les nombreuses missions d’étude que l’institut a continué à effectuer ont permis à ICEO d’acquérir une compétence reconnue, en matière de coopération internationale bilatérale décentralisée.

28 novembre 2007, invitation du Secrétaire général d’ICEO au séminaire international organisé à Budapest par le World Political Forum présidé par son fondateur, l’ancien président de l’Union soviétique, Mikhaïl GORBATCHEV.

28 novembre 2007 Budapest, Pierre retrouve le Président ILLIESCU.

Entre 2007 et 2010, la fondation présidée par Mikhaïl GORBATCHEV a changé de nom, mais n’a pas changé d’objet : réunir une quarantaine d’experts du monde entier, autour d’un thème géopolitique précis.

World Political Forum (Budapest 2007) : " European dream :promises and reality."

ICEO (Budapest 2007) :"Le trilinguisme, ciment de l’Union européenne."

New Policy Forum (Sofia 2010) :" Europe looks East "

ICEO (Sofia 2010) : "L’Union européenne et les États de droit pris aux mots à l’école des Rroms"

10 octobre 2010, Sofia, après son exposé, le Secrétaire général d’ICEO est invité à venir s’asseoir à coté de lui par l’ancien Président ILLIESCU.

L’exposé du Secrétaire général, a reçu les félicitations de l’ancien Président de la Roumanie, Ion ILLIESCU. Pour des raisons politiques et familiales, celui-ci connaît particulièrement bien les problèmes que rencontrent les Rroms en Europe en général, et en Roumanie en particulier. En 2010, Pierre a pu vérifier que, 20 ans après, le Président ILLIESCU n’avait pas oublié le caractère bien trempé de Marin NISIPEANU.

À la suite de Sofia, en mai 2011, après des mois de préparation, Pierre et Jean-Marie effectue une mission exploratoire dans le Judet de Ramnicu Valcea. À Ramnicu Valcea, Gabriela, cousine germaine de Marin, professeur de Mathématiques, elle aussi, est devenue inspecteur général du judet de Valcea. Elle soutient le projet d’ICEO. Pierre et Jean-Marie effectue une mission exploratoire dans le Judet de Rumnica Valcea en mai 2011.

En tant qu’enseignant à l’Université et en tant qu’ancien président du CFSN de Dolj, Marin a de nombreuses fois eu à connaître de la spécificité de la culture rrom. Son regard sur nos travaux est donc particulièrement précieux.

Rencontrer Marin, que Pierre n’a pas revu depuis de longues années s’impose donc comme une évidence.

16 mai 2011, Marin vient accueillir et chercher en voiture, Pierre et Jean-Marie, au centre de Craiova. La ville a beaucoup changé.

16 mai 2011, Marin fait la connaissance de Jean-Marie devant la Chambre de commerce de Craiova..

16 mai 2011, Illiana accueille ses hôtes français.

16 mai 2011, elle leur fait la visite du "petit musée" de l’appartement.

Selon l’humeur du maître de maison, "Sefu" , comme l’appelle Kati dans sa dédicace à son père "Tata", met en avant les photos et les objets qui ont l’heur de retenir son attention du moment.

Le 16 mai 2011, Kati (hongrois) ou Cati (roumain) tenait la vedette

16 mai 2011, on comprend pourquoi

16 mai 2011, Marin et Illiana sont toujours aussi accueillants.

16 mai 2011, Il faut quitter et remercier Illiana et Marin.

16 mai 2011, Marin tient absolument à raccompagner Jean-Marie et Pierre jusqu’à leur voiture.

13 juin 2014, Nouvelle mission de Jean-Marie et Pierre à Ramnicu-Valcea. Arrêt en route pour la nuit à l’hôtel à Craiova. Dernier dîner partagé avec Marin et Illiana.

16 juin 2014, Jean-Marie et Pierre sont accueillis à Ramnicu-Valcea par Gabriela, la cousine germaine de Marin.

7 décembre 2015, Cristi (Cristian), le gendre de Marin, passe saluer Pierre, comme chaque fois qu’il est de passage à Montpellier.

Le 6 septembre 2018, dès qu’ils apprennent la mort de Marin, avant de courir prendre l’avion pour assister à son enterrement, Cristi et Marica, préviennent Pierre et ICEO du décès de leur père.

“Bonjour Pierre,

Mon papa, Marin Nisipeanu est décédé ce 6 juin 2018 après plusieurs mois d’hospitalisation. Son enterrement est prévu ce dimanche à 12h (heure locale) à Craiova."

Marica B.

Merci Marica, Merci Cristi !

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Solidarité avec la Roumanie ?

Trente ans après ces écrits, il est intéressant de confronter les intentions et les réalisations. Ceux qui se sont approprié la paternité du voyage humanitaire de décembre 1989, qui se sont arrêtés à Craiova, par peur d’aller à Pitesti, n’ont tenu aucune des promesses formulées dans le bulletin municipal ci-dessous.

Des paroles et des actes ?

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